Avant de devenir une PME, la fonderie est une division de Synfina, filiale de la multinationale Pétrofina. A l’origine, sa vocation est de produire des moules pour les entreprises du groupe, mais pour maintenir son volume d’activité et d’emploi, l’atelier offre ses services en sous-traitance. Dès le milieu des années septante (cinq ans après la création), il fournit essentiellement le secteur de l’industrie plastique pour le procédé de centrifugation. Un jour, un constructeur automobile lui confie le développement d’une forme pour les flancs intérieurs de sa nouvelle voiture : c’est la Simca Rancho. La commande est complexe. Mais la qualité d’exécution qui est au rendez vous ouvre les portes des entreprises verrières, extrêmement exigeantes.
Success story mondiale
Pour la fabrication des outillages verriers, la fonderie recourt au procédé de moulage céramique qu’elle a elle-même breveté. Son nom : Fine Cast. C’est de lui que vient celui de la PME que reprend le chef d’atelier quand le groupe décide de s’en défaire. Mais en clin d’œil au pays qui l’a accueilli, Joseph Ortogni remplace Fine par Wal de Wallonie. Walcast vient de naître. La jeune SA reprend les équipements, les cinq membres du personnel et les clients en 1986. L’outil est déménagé de Manage vers Gosselies. Leader dans sa niche, l’entreprise offre aux verriers une solution plus rapide et plus économique pour la fourniture de leurs batteries de moules fins. C’est le début d’une success story. Pendant deux ans, elle continue à servir ses clients de la filière plastique. Mais les prix moins avantageux, l’instabilité du secteur l’amènent à concentrer tous ses efforts sur les empreintes d’articles de cristallerie et de lustrerie. Il s’agit de plats, vases, vaisselle, vasques, objets décoratifs, mais aussi de briques et d’éléments de construction en verre –des produits à forte valeur ajoutée. Au plus le détail est poussé dans le décor, au plus le procédé est adapté. Pour le pyrex, la PME est spécialisée dans le choix de l’acier. De 88 à 92, Walcast enlève ainsi des marchés en Europe, puis s’attaque à la grande exportation : Russie, Inde, Corée du Nord, Chine, Indonésie. « Aujourd’hui, nous exportons 100% de ce qui sort de l’atelier, dont 40 à 70% hors CEE ». L’entreprise est présente sur quatre continents.
Un procédé sans concurrence
Pour produire ses moules en alliages spéciaux, la PME travaille d’après plans ou maquettes. Elle peut aussi confier le développement du projet à son bureau de dessin. En l’espace de cinq ans, Walcast s’est fait une solide expérience dans ce domaine. Designer industriel de formation, Fabrice Ortogni est en mesure de créer des articles à la demande. « Nous avons essayé d’en concevoir d’initiative et de vendre les moules, mais l’expérience a tourné à l’échec. C’est un secteur où le client vient avec ses idées » explique son père. La recherche et développement en partenariat marche bien. « Nous signons de plus en plus de contrats de ce type » Le savoir-faire de Walcast est mondialement reconnu. L’entreprise est désormais contactée par des verreries étrangères qui connaissent l’efficacité de son procédé. « Nous avons des concurrents qui en emploient d’autres. Jusqu’à présent, c’est le nôtre qui donne les meilleurs résultats dans le détail fin des décors. L’emploi s’est étoffé : ainsi, la fonderie emploie aujourd’hui 14 travailleurs, dont 10 ouvriers. L’usinage mécanique en sous-traitance en occupe une autre dizaine.
Joseph Ortogni
Technicien de fonderie de formation, Joseph Ortogni a racheté l’atelier qu’il dirigeait quand son employeur a décidé de s’en séparer. Toutes les conditions du succès étaient réunies : l’outil était récent, en bon état de marche, les procédés de moulage innovants ; il avait un fonds de clients et donc un chiffre d’affaires assuré ; il connaissait son personnel et ses capacités de travail ; enfin, dans la mesure où Pétrofina a financé le déménagement de l’outil, il a même pu compter sur de la trésorerie. « Peu d’entrepreneurs débutent une activité dans un contexte aussi favorable » note-t-il. Très vite, il choisit de se consacrer aux verreries. Il participe à des salons professionnels et investit le secteur. Pour vendre, la PME renonce à mettre en place un réseau d’agents commerciaux et préfère travailler en direct. Elle veut garder la maîtrise de son produit, de sa négociation. Elle peut se le permettre dans une niche où elle est leader. Le développement du bureau d’études est l’un des objectifs en cours de réalisation. Ce n’est pas le seul. L’administrateur-délégué a engagé Walcast dans une procédure de certification Iso 9002. Un chef de projet a été embauché. L’ambition est d’obtenir l’Iso à la fin 2003 ou en début 2004.
Expériences d'Entrepreneurs en 4 questions et réponses.
. Quelle idée nouvelle est à la base de la création de votre entreprise ?
Ce n’est pas une idée, mais plutôt un concept, en vogue depuis déjà une dizaine d’années en Angleterre quand je me suis installé. Il s’agit du « management by out », c'est-à -dire l’externalisation d’un département d’entreprise, son rachat par un membre du personnel. En 1985, la filiale de Pétrofina où j’étais employé –Synfina- m’a proposé de reprendre à mon compte la gestion de l’atelier de fonderie qui était menacé de fermeture. Je connaissais les clients, les prix, les marges bénéficiaires. L’outil était moderne. J’ai décidé de sauvegarder mon emploi et celui de mes collègues.
. Quelle est la plus grande difficulté que vous ayez rencontrée pour créer ou développer votre entreprise ?
A la base, je suis un technicien. J’étais habitué à rendre des comptes à ma direction même si elle me laissait de l’autonomie. Devenir indépendant, c’est travailler sans filet, assumer les responsabilités et les risques que l’on prend. Le répondant m’a souvent manqué. Ce fut une gêne pour moi mais pas un obstacle au développement de l’entreprise. J’ai toujours apprécié le suivi de Sambrinvest dans la tenue de notre gestion : sa participation nous oblige à beaucoup de rigueur sur le plan financier. C’est une excellente chose.
. Quelle est la plus grande joie ou satisfaction que vous a procuré votre entreprise et –si c’est le cas- pourquoi n’auriez vous pas pu vivre la même chose en tant qu’employé ?
C’est imposer une PME sur le marché mondial, en faire une référence dans son secteur. Walcast est connu internationalement dans le domaine de la verrerie, j’en éprouve une certaine fierté. Nous ne vendons rien en Belgique. Une petite moitié de nos produits est distribuée en Europe, l’autre part à la grande exportation. En tant qu’employeur, j’ai aussi la satisfaction de faire vivre directement et indirectement une cinquantaine de familles.
. Quel petit « truc » proposeriez-vous à un jeune entrepreneur ?
Je lui dirais d’être responsable. Le statut d’indépendant n’est pas de tout repos : il faut s’investir à fond dans ce que l’on fait, s’efforcer d’être le meilleur, le premier dans son core business. Il ne suffit plus d’avoir la parfaite maîtrise du métier que l’on va exercer. Si d’autres connaissances sont nécessaires, la responsabilité me semble primordiale.


















